samedi 17 janvier 2009

4-CREONS 500,000 EMPLOIS POUR LES JEUNES DU PAYS

Construisons Ensemble un État Démocratique, Moderne et Prospère

Haiti rentre dans une période de grande difficulté économique due en partie à la crise internationale, mais beaucoup plus à une absence de courage politique et d’imagination de la part du gouvernement pour formuler une politique appropriée à une telle période. En effet, certains pays trouveront dans cette crise une opportunité de relance de leur économie mais d’autres déboucheront sur un désastre. La question est de savoir que compte faire le gouvernement face à cette crise ? Est-ce que ce sera un désastre ou une opportunité? Est-ce qu’il n’existe pas dans cet environnement la possibilité de créer du travail dans le pays et particulièrement pour les jeunes? Car, il y a toujours eu une absence d’opportunité pour ce groupe qui représente la majorité de la population.

En effet, malgré le potentiel que les jeunes ont pour être dans le peloton de tête de la Grande Marche pour le développement du pays, ils sont toujours tout bonnement oubliés ou ils sont tout au moins sollicités quand il s’agit de les utiliser pour servir les petits intérêts mesquins et de chapelle. Jamais encore, on a cherché à les appeler au nom de la nation pour servir de fer de lance au développement et à la modernisation du pays et de travailler afin de sortir le peuple de sa situation de dénuement.

Il y a une nation à construire. Je connais tant de jeunes qui attendent un plan réaliste et les moyens pour se mettre au travail et transformer le pays en un vaste chantier.

C’est sur ces points que je compte m’étendre, aujourd’hui. Dans les textes précédents, j’avais mis surtout l’accent sur la dimension de cette crise qui, débutée aux Etats-Unis avec les hypothèques subprimes, a débouché sur une crise économique internationale et, contrairement aux crises précédentes, a la possibilité de durer plus de deux années.

OUI, NOUS POUVONS LE FAIRE !

Un gouvernement, comme celui du Président américain, Barack Obama, se prépare à transformer cette crise économique en une opportunité pour créer 3 millions d’emplois aux Etats-Unis, dans les trois prochaines années, en lançant de vastes programmes dans les domaines des énergies renouvelables, de la construction et de la réparation des infrastructures routières, de la restauration de l’environnement et du support aux municipalités pour leur permettre de créer du travail dans leur juridiction. Président Obama veut lancer de nouveaux programmes dans le domaine éducatif, également, pour rendre la population américaine plus productive et plus compétitive et relancer ainsi l’économie pour éviter que la crise prenne la dimension d’une dépression économique semblable à la catastrophe de la Grande Dépression des années 30.

Le financement du plan pourrait couter entre 825 milliards à 1 trillion de dollars. Compte tenu des dépenses déjà engagées par le gouvernement du Président Bush pour faire face à la crise, le déficit du budget américain pourrait atteindre 2 trillions de dollars et la dette publique, se placerait au niveau des 7 trillions de dollars, soit environ 50% du PIB.

Dans cette période de crise, le déficit budgétaire n’est pas dramatique. La plupart des pays de l’Union Européenne, à cause des mesures adoptées pour enrayer la crise, ont des budgets déficitaires. Par exemple, la France pourrait avoir sa dette publique au dessus de 50% de son PIB, donc bien plus haut que le taux prévu par les accords de l’Union Européenne. Mais, le President Français, Nicolas Sarkozy, a annoncé que son gouvernement prendra toutes les décisions nécessaires pour éviter à son pays de rentrer dans une dépression économique.

Ce genre de résolution n’est pas seulement l’affaire de grands pays, mais l’expression de la volonté de leaders qui vont en tête de la crise grâce à un effort courageux pour éviter à leur peuple les grandes souffrances que vont apporter cette crise. Pour Haiti, il semble que nos dirigeants se disent en aparté que le peuple est habitué à la souffrance et qu’il acceptera cette situation aussi bien. Pourtant, le gouvernement a l’opportunité d’envisager de soutenir l’économie en poussant la demande intérieure, ce qui exigerait un support direct aux secteurs porteurs les plus dynamiques qui ont la capacité de générer des effets multiplicateurs élevés et des incidences positives sur l’emploi. Car, il faut finalement se décider à créer du travail dans le pays, surtout pour les jeunes. Et dans ce contexte de crise, où même le Fond Monétaire International sort de sa rigueur traditionnelle pour trouver les déficits budgétaires acceptables, il est possible de vendre un plan d’investissement orienté vers nos jeunes aux bailleurs de fonds internationaux.

Mais, il faut une vision…

Depuis l’année 1986, j’ai exprimé dans le document sur la Renaissance Haïtienne qu’une réforme en profondeur de l’appareil d’État est un préalable au progrès du pays. Nous avons encore en place un État qui n’a pas le sens des droits de la majorité de la population qui est privée de presque tout ce qui donne de la dignité à la personne humaine ; et un appareil d’État qui vit au-dessus de ses moyens et qui est si dépendant de l’aide humanitaire qu’il n’est même pas en mesure d’assurer, seule, la sécurité des citoyens et du territoire qui est la première fonction d’un État indépendant. Il faut une vision nouvelle pour changer ce pays et l’amener au niveau de la société moderne et de transformer les hommes et les choses afin que nous produisions les biens et services qui sont nécessaires à notre communauté. Il faut dépenser moins et investir davantage.

Le chômage dans notre pays est, en réalité, endémique et au-dessus de 60% et plus de 72% de la population vit au-dessous du seuil de la misère, avec moins de $2 dollar par jour. Le pays ne pourra pas sortir de ce gouffre sans une mobilisation nationale pour lutter contre la misère et qui fasse appel aux jeunes à servir la nation, comme cela est prévu dans la Constitution de 1987. Mais, même quand, un gouvernement après l’autre parle de la mobilisation des jeunes, c’est toujours des vœux pieux qui ne se traduisent pas en actes. Car, ceux qui nous gouvernent ont toujours peur de ressembler, dans leurs actes, à des barbudos, de devenir des émules de Castro, du Che ou de Cienfuegos. Ce que j’appelle de la Paranoïa Post Guerre Froide. Car, de la mobilisation des jeunes on en fait sous toutes les étiquettes et avec toutes les nuances: de Mao à Castro, de Lénine à Kim Jong il, mais de FDR à JFK également. Donc, cela dépend vraiment de ce qu’on veut faire avec une mobilisation nationale.

Donc, au début de l’année 2008, j’avais vu venir la crise et préconisé qu’une partie des fonds de réserves de la Banque Centrale Haïtienne (BRH), ajouté à des fonds qui pourraient être économisés grâce à une réduction dans les dépenses de l’Etat, servent à lancer un programme de construction de trois nouvelles villes régionales. Ces grands projets pourraient créer du travail dans notre pays qui a un taux de plus de 60% de chômage et plus de 860 mille jeunes filles et jeunes garçons qui n’ont jamais travaillé de leur vie ?

Donc, on aurait anticipé la crise économique mondiale, avec son cortège de problèmes et on aurait entamé de transformer cette crise en opportunité pour les jeunes dans notre pays. Pourtant, Madame Pierre-Louis, dans ses déclarations de politique générale au parlement, avait parlé de son intention de lancer de grands travaux, d’ouvrir de grands chantiers afin de créer du travail. Où en est-on avec ces promesses ?

A considérer le vide du budget déposé devant le parlement sur ce sujet, il semblerait que Madame la Première Ministre n’a plus le cœur à cela. On pourrait dire que quand on est à la tête du gouvernement, on n’a plus à se faire de souci pour les autres. Car, on est chef, donc ça va. C’est pour les autres que cela ne va pas. C’est bien dommage !

Quand, enfin, allons-nous comprendre que l’avenir du pays dépend d’un effort national pour intégrer les jeunes dans la vie économique du pays ? Nous devons les intégrer soit en tant qu’entrepreneur ou en tant que professionnel qui peuvent embrasser une carrière qui leur offrira une vie honorable et décente. Nous parlons au nom de plusieurs centaines de milliers de jeunes qui sont actuellement sans espoir et frustrés. Cela va impliquer de gros investissements, certes. Même si d’après nos premières estimations, ces investissements pourraient porter sur plusieurs centaines de millions de dollars l’an, les bénéfices, en contrepartie, seront énormes et nous rentrerions dans une période de prospérité inégalée dans notre histoire. La seule chose qui manque c’est une vision.

De l’avis de la Commission des Nations Unies pour l’Amérique Latine et les Caraïbes, (CEPAL), la zone caribéenne va subir l’impact de la crise économique aux Etats-Unis, car cette crise va entrainer une réduction des exportations vers ce pays, la baisse des transferts des immigrants vers leur pays d’origine, moins de touristes venant des pays du Canada et des Etats-Unis et une baisse de l’investissement direct qui est déjà en déclin.

Mais, nous ne pouvons pas rester les bras croisés et attendre que la situation s’empire. Tout au contraire, nous pouvons transformer cette situation de crise en opportunité. La politique financière conservatrice poursuivie pendant la période intérimaire et de façon plus rigoureuse encore jusqu'à présent, prépare le pays à prendre des risques calculés pour lancer de grands programmes, avec un peu d’imagination, pour faire face à la crise qui pourrait dévaster le pays. Certainement, le succès de ces grands programmes exigera de la discipline et de bons choix. Donc, ces programmes ne devraient pas servir, à démontrer, une autre fois encore, que nous sommes devenus le pays le plus corrompu du monde. La crise appelle à un changement de paradigme et à de nouvelles stratégies. Mais, nous pouvons le faire.

D’abord, je propose que nous réduisions le nombre de priorités proposé par la Première Ministre pour concentrer nos ressources et énergies sur quelques objectifs que nous pouvons atteindre sur une période de 10 années. « Tout le reste doit venir après », comme disait l’ancien President de la Côte d’Ivoire, Félix Houphouët Boigny. Les 4 secteurs qui sont définis plus bas, doivent s’appuyer sur des politiques et des activités de support. Voici un tableau simplifié:

a) Les Infrastructures : Elles doivent inclure les routes, les aéroports et ports, la production et la distribution d’électricité, l’adduction d’eau potable et les grands travaux d’irrigation. Cette ligne de priorité doit être réalisée dans le cadre d’une Politique de Déconcentration créant 3 régions dont le Grand Nord, le Grand Sud et le Grand Centre ; et aussi d’une politique de Décentralisation et d’Aménagement Urbain et Rural, et de Construction de Logement et de Bâtiments Publics.
b) Le Tourisme : Cette priorité doit viser à court terme de dynamiser le touriste local et les visiteurs venant de la diaspora. Ensuite, l’accent doit être mis sur les visiteurs étrangers en ciblant des opérateurs spécialisés dans le tourisme d’aventure et culturels. Cette ligne de priorité sera supportée par les activités culturelles, les fêtes populaires et un système de Service d’Accueil moderne et très compétitif.
c) L’Agriculture devenant une priorité doit participer à la croissance, mais elle doit également servir à réduire la misère de la population rurale en modernisant la production pour fournir suffisamment de biens agricoles et permettre d’éradiquer la faim dans le pays. Ce secteur doit être en harmonie avec le développement écologique afin de protéger et de régénérer notre écosystème avec le support d’un réseau national de crédit dédié à l’agriculture pour encourager la production sur une base rationnelle.
d) L’Education doit s’engager à relever le défi établi par la Constitution d’offrir une formation de base a tous les enfants du pays et les mairies devront recevoir les moyens pour accomplir cette tache. Une attention spéciale doit être accordée, également, à tous les niveaux d’éducation afin d’assurer que la formation offerte soit de qualité et disponible avec une grande spécialisation dans les services de santé et la technologie.

Ces quatre secteurs porteurs peuvent servir de moteur à une croissance économique accélérée de façon durable. Le fait de lancer une croissance accélérée de l’économie à partir de 4 secteurs et de 3 régions également, va offrir une diversité dès le départ et créer une certaine compétition pour les talents et les ressources. Cela est nécessaire pour encourager l’évolution équilibrée des prestations de service et l’établissement d’un marché de travail avec des salaires décents pour les travailleurs et employés qui devront aussi bénéficier des fruits de la croissance économique de façon équitable. Car, la croissance économique ne peut suffire pour mesurer le bien-être d’une société si des mesures pour une répartition équitable des revenus ne sont pas adoptées.

Ensuite, la diversité des régions et des secteurs porteurs que je propose, a pour rôle, au-delà d’équilibrer le système, d’offrir une garantie de sécurité face à la possibilité qu’un secteur de l’économie puisse rentrer dans une période de ralentissement et entrainer toute l’économie dans sa suite. Il a été prouvé, dans plusieurs cas, que les secteurs de la santé et de l’éducation rentrent difficilement en déclin durant une période de récession. Les services qu’ils offrent sont presque toujours en demande et sont hautement prioritaires pour les consommateurs. Alors, cette diversification permettra à l’économie du pays de résister à des crises comme celles que traverse la communauté internationale maintenant.

Encourager la création de plusieurs milliers d’entreprises

Acceptons que toutes choses étant égales entre elles, au niveau courant du Produit Intérieur Brut (PIB) du pays, soit $5.4 milliards de dollars et une croissance projetée en moyenne de 10%, l’économie pourrait produire de façon cumulée sur 10 ans, environ $60 milliards de dollars en biens et en services. Donc, pour une population qui serait de 15 millions d’habitants, ce PIB représenterait $2000 l’an per capita. Mais, au taux de croissance que poursuit le gouvernement actuellement, le revenu d’un haïtien serait moins du 1/6 de celui d’un dominicain, dans cette même période, avec tout ce que cela implique, comme un plus grand nombre d’haïtiens allant dans les pays voisins pour fuir la misère dans leur pays.

Mais, nous pouvons changer le cours des choses, en choisissant d’investir $3 milliards de dollars, sur une période de 10 années, soit une moyenne de 1 milliard de dollars par région ou 300 millions de dollars l’an. Un tel investissement représenterait environ 5% de notre PIB, sur cette période. Et en comptant sur les effets multiplicateurs, notre économie pourrait atteindre une croissance moyenne de 10% l’an et doublerait sa capacité de production de biens et de services pour amener le revenu per capita à un niveau où le pays rentrerait dans une situation où la majorité de la population ne croupirait plus dans une misère dégradante.

Des objectifs mesurables, en termes d’emplois, doivent être assignés aux secteurs porteurs de la croissance. Par exemple, il serait possible d’obtenir 200,000 emplois dans le secteur agricole et les services relatifs à l’environnement, principalement dans la reforestation ; de créer 150,000 emplois dans le domaine des travaux d’infrastructure, de la construction de logement et d’immeubles ; 100,000 emplois dans le domaine de l’éducation et de l’amélioration des services de santé et la technologie et enfin 50,000 dans le secteur touristique supporté par les services d’accueil, les activités culturelles et celles liées aux fêtes populaires champêtres et carnavalesques.

Pour mettre 500,000 jeunes au travail de façon progressive, l’accent doit être porté sur l’entreprenariat et l’occupation professionnelle, pas uniquement sur l’emploi. En effet, il faut encourager les jeunes filles et les jeunes garçons du pays à créer leur propre entreprise, soit dans la production ou dans les services. Ils doivent devenir eux-mêmes des employeurs et créer des milliers d’emplois qui abaisseront le taux de chômage qui est à un niveau aberrant aujourd’hui.

Ainsi, malgré que le lancement de la création massive d’emplois serait initié par l’État, ou à proprement parler par le secteur public, le secteur privé, dans la seconde étape sera le principal créateur d’emplois, grâce à des milliers de petites entreprises qui seront créées en grande partie par les jeunes entrepreneurs. Mais, les entrepreneurs aguerris, également, contribueront largement à la création d’opportunité d’emplois et de richesse dans le pays à partir d’un appui que les programmes de support à la croissance offriront aux secteurs de production les plus performants. Car, les entreprises ont beaucoup plus de possibilité de continuer à créer du travail même après que les programmes incitatifs seraient terminés par le gouvernement.

Qui devrait-on classer sous l’appellation de jeunes ?

C’est une question qui est encore débattue par la catégorie de la population qui doit être le principal bénéficiaire d’un effort de mobilisation national pour le développement. Du point de vue statistique, serait classé comme jeune, le groupe d’âge qui va de 16 à 30 ans. Alors là, dans quelle catégorie il faudrait ranger ce jeune homme de 33 ans qui a déjà trois diplômes, mais n’a jamais eu un emploi pour gagner sa vie et qui vit encore chez ses parents ? Donc, être un jeune n’est pas seulement une statistique, mais une réalité de vie quotidienne pour tous ceux-là que le pays n’offre encore aucun avenir.

Il faut rendre le pays très compétitif en termes d’environnement pour les entrepreneurs, jeunes et matures, et faciliter la création et le succès des petites entreprises. Il faut créer un environnement dans lequel il sera aussi facile de créer une entreprise que de trouver un travail. Il faudra aussi mettre l’accent sur la productivité en encourageant la formation continue et l’investissement dans la technologie.

Cependant, nous ne pouvons pas lancer cet effort national juste pour créer du travail et sans mettre en place les structures administratives qui permettront un développement durable qui continuera pour les années à venir et de génération en génération. Le développement, comme la démocratie, est un processus continu. C’est l’occasion de construire quelque chose qui a de la valeur et qui va durer et qui fera avancer le pays sur la voie de la modernisation. Ainsi, nous devons investir dans nos jeunes qui sont l’avenir de ce pays.

500,000 jeunes au travail avec des talents compétitifs et un haut niveau de productivité, vont accélérer la croissance économique du pays, augmenter le revenu per capita et doubler le niveau de la Production Intérieure Brute en très peu de temps. Ces jeunes sont là et attendent. Ce qui manque c’est la volonté politique et de l’imagination.
En fait, je veux répéter que ce qui fait la richesse et la pauvreté d’une nation ce sont ses hommes et ses femmes et la vision qu’ils ont de la vie et d’eux-mêmes. Car, on a des pays pauvres qui ont beaucoup de ressources naturelles ; mais, on a des pays riches qui sont pourtant sans ressources naturelles. Ainsi, il faut croire que c’est le travail du peuple qui fait la richesse des nations. Donc, construisons un pays digne à partir de nos hommes et nos femmes et commençons en créant du travail pour les jeunes, afin que nous n’ayons pas une autre génération de perdue.

Merci,
Paul G. Magloire
17.01.09

http://pmagloire.blogspot.com/2009/01/prospectives-pour-une-renaissance.html

http://decentralisationenhaiti.blogspot.com/2009/01/programme-de-la-deconcentration-de-port.html


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