samedi 3 janvier 2009

3-COMBIEN DE TEMPS VA DURER LA CRISE ECONOMIQUE MONDIALE


PAUL G. MAGLOIRE – PROSPECTIVES

Construisons Ensemble un État Démocratique, Moderne et Prospère, par Paul G. Magloire

3-COMBIEN DE TEMPS VA DURER LA CRISE ECONOMIQUE MONDIALE


Si au début de l’année 2008 quelqu’un vous disait qu’à la fin de l’année 2008 le gouvernement américain allait devenir actionnaire dans de grandes banques et aurait nationalisé des entreprises financières, vous lui auriez demandé qu’est-ce qu’il venait de boire ?

Mais ce paradoxe du capitalisme de la libre entreprise et de la non-intervention de l’État sur le marché est une vérité aujourd’hui. Car, pour freiner la descente aux enfers de l’économie et du secteur financier, le gouvernement fédéral des Etats-Unis est sorti du paradigme traditionnel de l’économie capitaliste de libre compétition sur le marché, avec tous les moyens à sa disposition.

En effet, le gouvernement Bush a adopté dans le cours de l’année 2008, plusieurs mesures ciblant des institutions, des secteurs et les États les plus touchés par la crise financière créée par les hypothèques subprimes, comme la Floride, la Californie et le Nevada. Par exemple, pour relancer le marché de l’immobilier, le gouvernement a offert de payer la moitié du versement initial pour les acheteurs modestes qui veulent acheter leur première maison. Toutefois, pour prévenir la spéculation et le coulage, ils ont inclus la condition exigeant que si un propriétaire qui bénéficie d’une telle subvention vend sa propriété avant un certain nombre d’années, l’État récupèrera l’argent qu’il avait versé avec les intérêts. Une autre mesure consiste à payer la moitié du paiement du loyer pour de nouveaux locataires qui ont de faibles revenus, afin d’éviter qu’une quantité de maisons vides baissent la valeur des quartiers là où elles se trouvent.

Toutes ces mesures, cependant, n’avaient pas pu enrayer la crise du secteur logement, car les banques ayant très peu de liquidités étaient réticentes à financer de nouvelles hypothèques dans un secteur en déclin. Le gouvernement fédéral avait pris la décision, aussi, d’intervenir directement pour financer et recapitaliser les banques en difficulté et toutes ces interventions pourraient coûter plus d’un trillion de dollars aux contribuables. La mesure la plus importante adoptée par le gouvernement américain a été le vote par le Congrès, le 2 octobre 2008, d’un programme de 700 milliards de dollars pour sauver les banques en difficultés. Ce programme dénommé par le public, Plan Polson, du nom du Secrétaire d’Etat au Trésor Américain, vise la participation directe dans les banques, créant la perspective pour que l’État Américain devienne le plus grand copropriétaire de banques de la planète. Dans le cadre du plan Polson, le gouvernement a également fourni le capital initial pour une banque de crédit. Cette banque recevra, aussi, 200 milliards de dollars de la Banque Centrale Américaine, la Fed, pour financer les petites entreprises et les prêts pour les étudiants.

Ces nouvelles mesures lancées par le gouvernement américain cherchent surtout à adresser le fait que la majorité de ceux qui ont financé l’achat de leur maison grâce à une hypothèque subprime ont des paiements maintenant qui représentent à peu près la moitié de leur revenu mensuel. Donc, dans cette période de récession, beaucoup de ces hypothèques ne seront pas payées et les banques auront encore moins de liquidités pour continuer à financer d’autres hypothèques et assurer une reprise du secteur de la construction et du logement. Ainsi, il est demandé aux banques qui sont recapitalisées par le trésor public, de renégocier leurs prêts hypothécaires à des taux plus bas, afin de permettre aux emprunteurs en difficulté de payer moins du tiers de leur salaire en obligation hypothécaire.

Ce ne sont pas uniquement les banques qui traversent des difficultés financières. C’est la même situation pour de grosses entreprises comme celles du secteur de l’automobile et d’autres entités importantes dans la vie nationale américaine, comme les Mairies et les États, comme la Californie et New York. Ils sont tous dans l’incapacité de trouver des fonds sur le marché pour financer leurs opérations au moment où ils sont en train d’enregistrer des déficits budgétaires très larges, dû à la baisse de leurs revenus. Dans cette situation de récession, les investisseurs évitent de mettre leur argent dans les bons municipaux et d’acheter ceux émis par une compagnie comme la General Motors, Inc. qui ne pouvant trouver l’argent pour financer l’achat de matière première et pour payer ses employés, considérait de déclarer faillite au début de l’année 2009. Là encore le gouvernement américain a du intervenir pour avancer près de 15 milliards de dollars au secteur de l’automobile qui emploies environ 2 millions de personnes. Les mairies ont eux un plan de 200 milliards de dollars qui sera présenté au gouvernement de Barack Obama pour financement, afin de créer du travail dans les municipalités.

Donc, la crise financière a forcé les Etats-Unis à abandonner les règles fondamentales de la non-intervention de l’Etat sur le marché et de laisser l’équilibre se rétablir par le jeu de l’offre et de la demande. Ce changement de paradigme a été adopté pour éviter que cette récession débouche sur une dépression, qui, selon le President Bush, pourrait être pire que celle des années 30. En fait, l’intervention de l’Etat américain est massive et cette injection de cash sur le marché, soit en achetant des actions préférentielles dans les compagnies, ou en leur empruntant de l’argent directement, apporte beaucoup plus de liquidités dans le système financier. Le gouvernement fédéral est même en train de garantir les dettes à la consommation, en achetant des banques les créances de clients qui ont financé des voitures et des fournitures d’ameublement. D’après les estimations de certains économistes, le gouvernement américain pourrait assumer, à ce rythme, des responsabilités financières pour environ 7 trillions de dollars, soit l’équivalent de 50% de l’économie du pays qui est de 14 trillions de dollars à peu prés.

Ces mesures interventionnistes qui rappellent les pratiques des économies mixtes de tendance socialiste d’autrefois, ont été mises en application de façon pragmatique pour chercher à réduire les impacts de la plus grande crise que connaît l’économie mondiale depuis 1929.

Cependant, même les économistes les plus conservateurs sont obligés de s’incliner sans trop faire d’histoire devant cette décision des autorités américaines d’intervenir sur le marché massivement. Le marché de l’emploi a déjà subi un taux de chômage de 6.7%. On prévoit que des milliers de compagnies en difficulté vont licencier des millions d’employés dans l’année 2009. Eviter les licenciements massifs autant que possible est essentiel, car la consommation qui représente plus de 60% de l’économie, chutera avec la réduction de la masse salariale et les prix des marchandises pourraient suivre pour chercher à attirer la clientèle. Ainsi de suite, ce mixte pourrait créer une situation déflationniste où les prix baissent et les marges de profits des entreprises deviennent négatives, entraînant de plus en plus de banqueroute et de chômage jusqu'à une dépression aigue de l’économie américaine. Le Japon, à la fin des années 1990, était rentré dans une spirale déflationniste qui avait duré près de 10 années.

Le gouvernement américain a parfois mené ses actions en coordination avec les autres pays les plus riches de la planète. Par exemple, ces pays se sont concertés à plusieurs reprises pour des interventions sur le marché, pour apporter des liquidités à travers leur banque centrale, afin d’enrayer les effets de la crise sur l’économie mondiale. Ils ont pris aussi des engagements, le 15 novembre 2008, à Washington DC, dans le cadre du Sommet des G20, de réévaluer leurs efforts et de prendre des décisions plus importantes encore, si cela devenait nécessaire. Car, sur la demande du Président Français, Nicolas Sarkozy et de l’Union Européenne, il faudrait une réforme en profondeur des institutions de Bretton Woods afin de les mettre à la hauteur de la nouvelle situation de l’économie mondiale d’aujourd’hui. Pour le moment, le Sommet du Groupe des 20 s’est accordé uniquement sur des principes qui viseraient à augmenter l’aide fournie par le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale au pays les plus fragiles. Ils ont pris aussi l’engagement d’envisager des réformes dans le cadre d’un autre Sommet, en avril 2009, qui sera réalisé avec le nouveau gouvernement Américain. Ces réformes viseraient, également, de donner des rôles plus importants à des pays émergents, comme la Chine, l’Inde et le Brésil et de créer un dispositif d’alerte aux crises et même un « Collège des Superviseurs » pour contrôler les plus grandes banques qui opèrent sur la scène internationale en utilisant les contradictions, d’un pays à un autre, pour prendre des risques qui ont largement contribué à l’intensité de la crise.

Le sommet du Groupe des 20 plus grandes économies du monde, ou G20, a réuni les pays du G8 (les 8 pays les plus industrialisés, à savoir l´Allemagne, la France, Les États-Unis d´Amérique, le Japon, le Canada, l´Italie, la Grande Bretagne et la Russie), l´Union Européenne et 11 pays émergents: l´Argentine, l´Australie, l´Arabie Saoudite, le Mexique, le Brésil, l´Inde, la Chine, la Corée du Sud, l´Indonésie, l´Afrique du Sud et la Turquie.

De son coté, le Président français, Nicolas Sarkozy, annonçait, le 13 octobre 2008, un plan de secours aux banques et institutions en difficulté qui pourrait atteindre 36 milliards d’euros, soit environ 50 milliards de dollars. Quelques semaines plus tard, c’était le tour des autorités chinoises, de Pékin, d’annoncer un plan de 586 milliards de dollars pour dynamiser l’économie de leur pays. Et le 28 septembre 2008, déjà, la banque centrale américaine avait mené la première action coordonnée de son histoire, avec des banques centrales européennes et asiatiques, pour mettre environ un trillion de dollars en liquidité à la disposition des banques commerciales sous le marché mondial.

Tous ces efforts cherchent à éviter que cette crise ne dure pas aussi longtemps que la Grande Dépression des années 30. Cette dépression économique, en effet, qui commença officiellement avec le crash financier de 1929, dura plus de 10 ans, jusqu'à la Deuxième Guerre Mondiale. Elle avait changé le monde. Et on attend que si cette crise d’aujourd’hui devienne une Grande Dépression également, le monde ne sera plus comme avant. Cela sera une opportunité pour certains et un désastre pour d’autres. Mais, malgré que cette crise soit vraiment mondiale, due à la globalisation du système financier qui inclut maintenant les anciens pays du bloc soviétique et la Chine, les mesures prises assez vite pourraient servir à pondérer ses effets.


Un Système poussé à l’extrême révèle ses faiblesses
L’un des facteurs qui pourrait empêcher à cette crise d’avoir l’impact de la dépression de 1929 est le rôle que va jouer des institutions qui ont été créées durant la Grande Dépression, les mesures qui ont été adoptées par les grandes économies et le fait même de la globalité de cette crise qui permet à l’information de se répandre et de s’échanger rapidement.

L’Agence d’Assurance sur les Dépôts Bancaires, en anglais, Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), a été l’une des premières institutions américaines à réagir pour empêcher que la crise financière aux Etats-Unis débouche sur une panique bancaire, comme cela a été le cas en 1929. Cette institution, d’ailleurs, avait été créée durant la Grande Dépression pour offrir la garantie de l’État sur une partie des dépôts des clients dans les banques. Cette garantie de la FDIC couvrait les premiers $100,000 dollars jusqu'à présent. La FDIC l’a augmenté pour atteindre les premiers $250,000 qui représentent le plafond numérique de plus de 60% des dépôts. Dans les autres pays, comme en Angleterre et en France, où des systèmes similaires existent, la couverture d’assurance a été augmentée également.

Pourtant, une autre institution des années 30, la SEC (Security Exchange Commission), ou la Commission pour la régulation et la surveillance des transactions boursières, a été elle-même accusée de laxisme, du fait qu’elle n’a pas vu arriver la crise. Mais, cet organisme a pris des mesures pour accompagner le Département du Trésor des Etats-Unis à éviter une panique boursière dans la dimension du Mardi Noir de 1929. Elle a à sa disposition des mécanismes qui lui permettent d’arrêter les transactions de la bourse de Wall Street sitôt que les valeurs boursières tomberaient à un niveau proche de la panique. La SEC a aussi d’autres moyens coercitifs dans son arsenal pour interdire des types de transactions qui pourraient être préjudiciables à l’équilibre de la bourse. Ainsi, elle n’avait pas hésité à interdire aux operateurs financiers, qui misaient sur la chute des banques engagées dans les subprimes, de continuer leurs opérations en bourse, pour un certain temps.

Mais, le volume des produits dérivés appuyés sur les bons des hypothèques subprimes était si énorme que les interventions de la SEC ne pouvaient pas empêcher la bourse de Wall Street de chuter. Comme nous le savons, certains de ces produits étaient créés par des esprits si sophistiqués et si fertiles que très peu de dirigeants d’entreprises financières eux-mêmes savaient ce que renfermaient vraiment ces dérivatifs, ou sur quels produits réels ils étaient adossés. Mais, tout le monde faisait semblant de savoir et d’y croire pour ne pas paraître stupide devant leurs collègues. Car, les dérivatifs étaient le grand jeu et rapportaient beaucoup d’argent.

C’était le cas pour les produits dérivés et structurés qui est un système de Contrats d’échanges de Risques de Défauts, en anglais, Credit Default Swaps ou des contrats d’échange sur la défaillance de payement dénommé CDS, dans le jargon à la mode. En effet, une banque ou une entreprise financière qui finançait une obligation ou un projet tels qu’un contrat de vente de maison, la construction d’un centre commercial, d’un village, la construction d’une usine, faisait signer aux clients des bons à termes. Pour se protéger des risques que pourraient représenter un défaut de paiement sur ces bons, paie à une autre institution financière une partie des bénéfices anticipés de ces bons pour un partage des risques. Quand l’obligation est arrivée à terme et le client honore le bon, la banque d’affaires qui avait participé au contrat d’assurance (CDS) n’a rien à payer, donc fait un profit sans rien investir. Mais, dans le cas où le client n’honore pas le bon, la banque d’affaires qui a garantie le CDS, paie le bon et le prend pour le revendre aux enchères à un prix au-dessous de sa valeur et enregistre la perte. Mais, des banques d’affaires spécialisées dans les CDS, parquaient ensemble ces contrats et les revendaient à d’autres investisseurs à partir de calcul sophistiqués sur les risques que représentaient ces paquets. Par exemple, avant sa faillite, la banque Lehman Brothers était spécialisée dans ces transactions. L’American International Group (AIG) avait garantie une bonne partie des CDS circulant sur le marché international.

Le grand problème dans les transactions sur les produits dérivés est le fait que les institutions qui garantissaient les CDS ne maintenaient pas de réserves liquides pour payer au cas où les documents qu’ils garantissaient entraient en défaut. Tel était le cas pour Lehman Brothers. Aucune loi, également, ne régissait ces transactions.

Le pire c’est qu’un investisseur ne savait pas toujours vraiment la valeur des obligations structurées sur lesquelles s’adossait un dérivative. Dans la plupart des cas, les bons signés par les acheteurs de maisons au crédit douteux, étaient classés par les bureaux de notation dans une catégorie peu fiable de série BBB, ou bons peu viables par rapport aux bons commerciaux fiables qui étaient classés dans la catégorie la plus élevée qui est le AAA. Les règlements de la SEC interdisaient que les fonds de pensions investissent leurs avoirs dans des obligations classées au-dessous de A. Donc, pour contourner ces règlements, les banques d’affaires prenaient les bons provenant des hypothèques subprimes, les compilaient et ensuite les coupaient en tranche à partir de calculs sophistiqués qui étaient sensés déterminer leur niveau de risque probable. Ces tranches étaient alors dénommés des Obligations de Dettes sur Collatéral, en anglais, Collatéral Debt Obligation ou CDO. Chaque tranche représentait une catégorie de risque par rapport à la totalité du paquet. Par exemple, dans une structure à trois tranches, la première tranche pourrait représenter les premiers 30% qui ne seront pas payés si 30% du lot subissait un défaut. Une deuxième tranche de 60% pourrait ne pas être payée ensuite, si 90% du lot était en défaut. Le reste des 10% du lot ne serait pas payée que si le lot à 100% était en défaut. Alors, ces obligations structurées étaient revendues en proportion de leur pourcentage de risques avec des marges très larges de profits et pour ceux qui les achetaient et pour ceux qui les vendaient sur le marché. La tranche qui avait le moins de risque de default était classée, alors, dans la catégorie AAA. Mais, les structures devenaient si sophistiquées qu’elles avaient parfois plus de 10 tranches. Donc, quand le taux de défaut dans le payement des hypothèques subprimes avait dépassé 15%, les premiers CDO adossés sur les bons subprimes avaient perdu leur valeur. Les investisseurs qui avaient perdu beaucoup d’argent pensaient que le système allait s’effondrer et ont suspendu l’achat des dérivés. Car, ils se disaient que leur chance de gagner était trop faible et les nouvelles sur le secteur du logement dans des États comme la Californie, le Nevada et la Floride étaient trop alarmantes. Ce système, appelé aussi titrisation, est le fait de prendre des titres de dettes de valeur différente et de les vendre en groupe à des investisseurs qui ignorent le produit.

L’idée qui prévalait pendant cette époque était que l’économie mondiale qui connaissait une croissance presque continue depuis trente années, continuerait à supporter la prospérité et le marché financier aussi, de façon indéfinie. Au moment de la crise de 2008, des milliers de banques faisaient des transactions appuyées sur les CDSs. La banque d’affaires Lehman Brothers, par exemple, avant sa faillite, avaient 441 milliards de dollars en CDS qui circulaient sur le marché financier et les contrats sur dérivatives représentaient environ 55 trillions de dollars sur le marché financier international, soit deux fois l’équivalent combiné du Produit Intérieur Brut des Etats-Unis, du Japon et de l’Union Européenne. Car, les dérivatives sont adossées à toute une série de dettes.

La faiblesse d’une institution de contrôle comme la SEC s’est démontrée avec le scandale de Bernard Madoff, un courtier à la bourse de Wall Street qui a trompé ses clients en mettant sur pied une vaste supercherie de faux investissements qui a roulé sur 50 milliards de dollars. Bernard Madoff avait mis sur pied un système en pyramide qui consiste à utiliser l’argent des nouveaux investisseurs pour payer les anciens investisseurs. Ce système avait duré tant que l’économie allait bien et qu’il y avait des investisseurs qui faisaient des dépôts. Mais, avec la crise financière, les investisseurs réclamaient leur argent en bloc. Ainsi, l’entreprise de Bernard Madoff fut à cours de ressources pour rembourser tous les investisseurs en même temps. La SEC, institutionnellement, le gendarme de la bourse de Wall Street, avait failli à sa mission.

Il y avait d’autres institutions qui avaient failli aussi à leur tache, comme les agences de notation qui s’occupent d’évaluer le profil financier des établissements engagés dans les prêts hypothécaires et d’évaluer leur solvabilité. Les trois plus importantes agences dans ce domaine étaient le Standard and Poor’s, Moody’s Investors Service et Fitch Rating. L’une des faiblesses de ces agences, c’est qu’ils touchaient de ceux-là même que leur travail était d’évaluer et parfois étaient engagés par des compagnies comme consultant pour des transactions visant à créer des CDO. Ce qui créait des conflits d’intérêts. Et d’aucuns pensent que ces conflits d’intérêts pourraient expliquer pourquoi ces agences de notation n’ont pas vu les grands risques que représentaient les transactions financières appuyées sur les hypothèques subprimes. Ainsi, ils classaient des tranches de CDO dans les catégories AAA qui est le niveau le plus élevé de garanti que peut recevoir une obligation financière qui est d’ailleurs celle accordée aux Bons du Trésor Américain.

En fait, il y a eu de nombreux abus et des superprofits, pas toujours très justes, qui se sont réalisés durant cette période. Après que plusieurs de ces grandes institutions sont entrées en difficulté, le gouvernement américain a du intervenir pour protéger l’intérêt public et des investigations policières étaient lancées pour trouver les vices et les abus du système. Mais les plus grands vices du système étaient les salaires astronomiques, et les parachutes de fins de services des exécutifs, sans oublier les paradis fiscaux qui permettent la réalisation de transactions financières derrières le dos du Bon Dieu ou de tout contrôle fiscal.

Il ne faut pas ignorer que la titrisation a créé, au début, des opportunités en amenant beaucoup de liquidités dans le système financier international. Mais, ensuite, elle avait créée une telle confusion qu’on ne savait pas vraiment les éléments qui composaient un produit qui passaient de mains en mains jusqu’au moment où les institutions n’avaient plus confiance dans ces papiers de garantie. Donc, ce manque de confiance va porter une banque à refuser d’emprunter à une autre banque, ne sachant pas la valeur de ses papiers et les risques qu’ils comportent. Ainsi, l’affaiblissement de la confiance dans le système va entrainer le gel du crédit, d’abord entre les banques, puis dans tous les secteurs de l’économie, des Etats-Unis d’abord, ensuite l’Europe, puis tout le globe était atteint. L’interconnectivité des marchés, le point saillant de la globalisation, va devenir son talon d’Achille, car tous les marchés étaient atteints très vite du gel du crédit.


Est-ce que le Pragmatisme du Capitalisme Suffira à éviter le pire?

Le taux d’intérêt aux Etats-Unis a atteint le niveau le plus bas, même au niveau de 0% pour des taux préférentiels. La banque centrale américaine a annoncé qu’elle est prête à imprimer autant de dollars que possible pour financer les activités d’affaires, dans le but d’éviter que le pays rentre dans une dépression économique. Des mesures ont été déjà adoptées pour permettre à la banque centrale d’acheter massivement les bons à long terme des portefeuilles de crédit des banques qui financent les hypothèques de maisons, refinancer les dettes des entreprises et même les bons des individus qui ont financé l’achat de voitures et de meubles. Cela pourrait représenter environs $3 trillion de dollars en nouveaux papiers monnaie en circulation, d’ici la fin de 2009. La Banque Centrale Américaine est, ainsi, en train d’utiliser tous les outils à sa disposition pour empêcher à la consommation de s’effondrer, pendant cette période déflationniste. La déflation est le résultat de la chute des cours du pétrole qui est tombé au niveau des prix de 2004, soit 27% de leur valeur marchande de $38, par rapport à leur pic de $149. Il y a aussi une baisse des ventes dans tous les domaines et, conséquemment, les prix tombent rapidement. Car, les entreprises en faillite cherchent à liquider leur inventaire et ceux toujours en opération, mais poussées par une vente très faible, se démêlent pour vendre à bas prix, pour diminuer leurs inventaires et leurs coûts d’entreposage.

Malgré les efforts qui sont lancés par les pays industriels et émergeants, rien ne semble être en mesure, jusqu’à présent, de freiner le déclin de l’économie mondiale. La saison des fêtes de fin d’année a été morose et a trompé les espérances qu’on avait placées en elle. Car, partout les ventes ont été très faibles. Les clients ont acheté moins, comparé à l’année 2007, dans les magasins très achalandés pour les fêtes. Pourtant, les prix ont été coupés, parfois de façon extraordinaire, à 90%. Sauf dans les ventes en ligne où on a enregistré une hausse notable des chiffres d’affaires. Mais, la vente sur Internet représente une infime partie de la vente des produits de consommation.

Ainsi, les mesures déjà engagées, jusqu'à présent, n’ont pas réussi à porter l’économie américaine à reprendre la direction ascendante. Est-ce que le plan que prépare l’équipe du President élu qui pourrait aller de 860 milliards à un trillion de dollars, dans le but de créer du travail, pourrait réussir là où l’équipe du président sortant a échoué ? Mais, la plus grande préoccupation est d’éviter à tout prix une grande dépression et les grandes lignes de chômeurs. Une dépression amènerait des problèmes de toutes sortes qui pourraient même taxer le statut de leader mondial des Etats-Unis.

La situation aux Etats-Unis aujourd’hui rappelle celle du Japon dans les années 90 qui était rentré en récession, après laquelle s’en est suivie une déflation, et l’économie est restée en crise pendant une période de près de 10 années. Mais, cette crise n’a pas encore les caractéristiques de la grande dépression de 1929, en termes de chômage. La chute de l’emploi, par exemple, en 1933 avait atteint 30% de la force du travail aux USA et de 40% dans des pays de l’Europe de l’Ouest. Il est encore en dessous de 7% aux Etats-Unis. Mais, beaucoup de signes montrent que la crise de l’immobilier et la faillite des entreprises continue à un taux qui présage que l’année 2009 sera dure. Par exemple, la vente des maisons à baissé de près de 9% en novembre 2008, malgré que le prix moyen des maisons est passé de $208,000 à $181,000 soit une réduction de 13%, ou le prix moyen de février 2004.

De vielles compagnies, tel un icône de la publication comme le New York Times, parlent de déclarer faillite au début de l’année 2009. Dans la ville de Manhattan, le quartier de Broadway, le poumon culturel de la ville, des dizaines de théâtres envisagent de mettre fin à leur shows de théâtres quotidiens qui sont parmi les plus prisés et les plus connus du monde, car le nombre des clients diminue, avec le quartier financier de Wall Street qui a déjà perdu 100,000 emplois et le nombre de touristes qui avoisinait prés de 20 millions dans la ville, a déjà enregistré une forte baisse avec la crise financière.

Si la situation économique des Etats-Unis continue à se dégrader, le reste du monde ne se tirera pas mieux et les autres grandes villes internationales, de Paris à Moscou, de Rio à Mexico, se préparent déjà pour une année 2009 qui ne sera pas des meilleures.

Ainsi, en plus des efforts concertés des grandes économies, dans toutes les régions et dans chaque pays, les gouvernements sont mobilisés contre le péril du grand déclin économique qui les oblige déjà à réviser leur projection de croissance à la baisse et d’adopter les mesures qui peuvent éviter à leur population les grandes douleurs qu’une dépression économique mondiale pourrait occasionner. Très certainement, la douleur des populations peut toujours se transformer en mécontentement populaire et ce sera alors aux gouvernants de souffrir à leur tour et de payer très cher leur manque de prévoyance.

La France, par exemple, a décidé d’encourager l’envoi des voitures usagées à la casse et paie une prime de 1,000 euros pour encourager l’achat de nouvelles voitures afin d’éviter que les usines et les concessionnaires de vente ferment leurs portes et licencient leurs employés. Le chômage grimpe à un niveau très haut en Espagne qui a connu 15 bonnes années de croissance portée par le secteur de la construction et le tourisme. Il est possible que 20% de la population de l’Espagne soit au chômage en 2010. Les autres pays européens ne sont pas exempts de la crise, l’Allemagne en tête, suivi de l’Italie et des autres pays européens, enregistrent tous un ralentissement de leur économie et une baisse de leur balance de paiement, due à une réduction du secteur exportation. Cette situation va entrainer des licenciements en masse et l’augmentation du budget des primes de chômage pour les travailleurs, dans ces pays où les assurances chômages sont élevées.

Le Japon et la Chine, comme les Etats-Unis et les pays européens ont approuvé des budgets exceptionnels, pour intervenir dans l’économie et faire face à la crise en lançant des programmes qui visent à créer du travail. Car, en Chine, aussi paradoxal que cela puisse paraître pour un pays d’essence communiste, des piquets de grèves apparaissent devant les usines qui veulent fermer leurs portes. En effet, le plus grand marché de la Chine, les Etats-Unis, est en train d’acheter moins. Le même phénomène se traduit au Japon où le géant de l’automobile, Toyota, créé dans les années 30, a connu en 2008 le premier déficit de son histoire, car la demande a grandement diminué sur le marché international, mais aussi sur le marché local, causant un ralentissement de 8.1% de la production industrielle pour le mois de novembre.

Les premières statistiques de 2009 montrent que la production industrielle baisse plus vite que les estimations les plus pessimistes. En Europe, par exemple, la baisse est en moyenne de 6% par rapport au mois précédent. Elle a subi un déclin comparable en Australie, en Chine et en Inde. Aux Etats-Unis, le niveau de la demande pour les biens industriels, est celui des années 80. Moins de demande, signifie moins de travail. Ce qui voudrait dire que l’économie mondiale est très loin de reprendre sa croissance et une dépression est possible.


Le prix des matières premières a subi une chute vertigineuse, en moyenne de 50% sur le marché mondial. D’après les analystes de Wall Street, les pays exportateurs de matières premières qui n’ont pas une économie très diversifiée vont connaître des moments de difficulté. C’est le cas pour les principaux pays exportateurs de pétroles réunis sous la bannière de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole, (OPEP) incluant le Vénézuela, le grand partenaire d’Haiti dans le cadre du programme Petrocaribe. Compte tenu que la consommation de pétrole dans les pays industriels a glissé au niveau de 2004, avec la récession mondiale, la demande a fortement baissé pour le pétrole. Ainsi, les prix sont tombés de leur pic de $149 à $38 sur le marché. Le grand problème avec ce prix, c’est que le coût de production du brut au Vénézuela, par exemple, avoisine $28 le baril. En fait, le Vénézuela a obtenu des revenus d’environ $40 milliards en 2008, et au taux actuel, ces revenus seront moins de $20 milliards en 2009. Ce qui voudrait dire, pour maintenir ses rentrées en devise au niveau actuel pour payer pour ses dépenses d’importation, qui dépasseront $50 milliards en 2009 selon ses prévisions, le Vénézuela pourrait être acculé à augmenter sa production de pétrole et ne pas respecter le plafond de l’OPEP, ou choisir entre diminuer ses dons en pétrole à travers Petrocaribe, ou réduire les dépenses supportées par les revenus du pétrole.

Le Brésil, le nouveau grand producteur de pétrole dans la région, ayant une économie assez diversifiée, est dans une meilleure position pour affronter cette crise économique. En fait, il faut rappeler que le géant Latino-Américain, dont le président, Luiz Ignacio Lula Da Silva, est aussi le principal compétiteur du leader vénézuélien, Hugo Chavez, pour le leadership de la région, est également un partenaire de Haiti.

Nous félicitons le President René Préval d’avoir annoncé, lors de son discours pour le Jour des Aïeux aux Gonaïves, que l’année 2009 sera très dure, compte tenu de la crise économique mondiale. Mais, est-ce que l’annoncer est suffisant ? Est-ce que le budget 2008-2009 que le gouvernement vient de présenter pour approbation au parlement, reflète des dispositions adéquates pour faire face à cette crise ? Est-ce que le budget reflète également les enjeux du contexte économique régional et mondial ?

Ce qui fait la richesse et la pauvreté d’une nation ce sont ses hommes et ses femmes. On a des pays pauvres qui ont beaucoup de ressources naturelles ; mais, on a des pays riches qui sont pourtant sans ressources naturelles. Ainsi, il faut croire que c’est le travail du peuple qui fait la richesse des nations. Donc, construisons un pays digne à partir de nos hommes et nos femmes, et commençons en créant du travail pour les jeunes, afin que nous n’ayons pas une autre génération perdue. J’aurai à revenir sur ce sujet.

Mais, je veux profiter de cette opportunité pour souhaiter à vous tous, une Bonne Année 2009. L’année dernière le pays a été durement éprouvé par les intempéries. Cette année sera également très difficile, compte tenu de la crise économique mondiale. Mais, nous pouvons l’utiliser comme un point pour un nouveau départ. Nous pouvons le faire !

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